
ACHETER-VENDRE UN CHEVAL - L’UTILITE D’UN CONTRAT
Publié le :
05/02/2025
05
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2025
L’achat ou la vente d’un cheval n’est pas anodin, il est important d’en connaître le régime juridique afin d’en appréhender les enjeux et les conséquences tant coté vendeur qu’ acheteur.
La vente des équidés est régie par les dispositions de l’article L 213-1 du Code Rural qui en constitue le droit commun.
« L'action en garantie, dans les ventes ou échanges d'animaux domestiques est régie, à défaut de conventions contraires, par les dispositions de la présente section, sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être dus, s'il y a dol. »
La vente des équidés est prioritairement soumise aux dispositions relatives aux vices rédhibitoires, sauf si une convention contraire soumet la convention à un autre régime, ou encore s’il y a eu un vice du consentement.
Nous verrons cependant que les tribunaux ont une vision très large de la convention contraire notamment lorsqu’il n’existe pas de contrat écrit.
Enfin, il est plus que recommandé d’avoir recours, avant toute acquisition, à une expertise de transaction, établie par un vétérinaire équin que l’acheteur prendra soin de choisir.
Tout comme le contrôle technique d’une voiture, la « visite d’achat » ou expertise de transaction dresse un état de santé du cheval avant son achat. Son étendue dépendra essentiellement de l’usage auquel on le destine.
Le vétérinaire conseillera au mieux l’acheteur sur l’étendue de la visite. Elle permet d’acheter en tout connaissance de l’état physique du cheval. Elle est essentielle et certains tribunaux ont pu reprocher à l’acquéreur de ne pas avoir fait procéder à une telle visite pour rejeter de leur demande d’annulation de la vente.
Elle n’est cependant pas exhaustive et ne permet pas de détecter tous les vices du cheval.
1. Les vices rédhibitoires.
Le code rural ne prévoit qu’une liste limitative des vices pouvant donner lieu à annulation, et le tribunal du lieu de vie de l’animal doit être saisi dans les 10 ou 30 jours de la vente afin de désigner un expert.Les vices listés pouvant entraîner l’annulation de la vente sont :
- L’immobilité (incoordination de l’appareil locomoteur par exemple)
- L’emphysème Pulmonaire,
- Le cornage chronique (bruit caractéristique lors de l’inspiration dû à la paralysie du muscle dilatateur du larynx)
- Le tic proprement dit avec ou sans usure des dents,
- Les boiteries anciennes intermittentes,
- L’uvéite isolée, (délai de 30 jours pour la résolution de la vente)
- L’anémie infectieuse des équidés (délai de 30 jour pour la résolution de la vente).
Le Code Rural limite les recours en annulation de la vente à ces cas définis il y a plus d’un siècle et qui sont aujourd’hui dépassés.
La médecine vétérinaire a beaucoup évolué, l’immobilité et les boiteries intermittentes par exemple, n’ont plus de véritable signification sur le plan vétérinaire.
En pratique on constate peu de contentieux, au regard de la complexité de la procédure qui nécessite de saisir en urgence le président du Tribunal Judiciaire dans le délai de 10 ou 30 jours en fonction du vice afin de désignation d’un expert vétérinaire. Ce délai strict court à compter de la livraison de l’équidé.
Le recours à l’expertise de transaction peut être utile en ce qu’il permet de les détecter avant la vente.
L’intérêt de ce dispositif réside dans le fait que dès lors que l’expert identifie un des vices mentionnés, l’annulation de la vente peut être prononcée judiciairement.
2. La convention contraire
Si la garantie des vices rédhibitoires ne peut être écartée, le code rural permet, par convention d’aller au-delà ce qui est prévu à l’article L 213-1.Les juges ont en effet une interprétation extensive de la notion de convention contraire allant jusqu’à admettre l’absence d’écrit.
La jurisprudence admet notamment à titre de preuve, les échanges par mails ou par SMS, les mentions figurant dans l’expertise de transaction vétérinaire, et aussi le prix de vente du cheval et encore l’annonce de vente.
En présence d’une convention contraire tacite, les dispositions relatives aux vices cachés des articles 1641 du Code Civil s’appliquent.
Dans ce cas, il appartient à l’acheteur qui souhaiterait obtenir l’annulation de la vente de démontrer que le vice était préexistant à la vente, caché et rendant le cheval impropre à sa destination.
Dans le cadre de l’annulation de la vente la qualité des parties est également essentielle dans la mesure où les conséquences de l’annulation ne seront pas les mêmes.
Ainsi dans le cadre d’une vente entre un professionnel et un consommateur, le vendeur professionnel qui est présumé connaître le vice caché, sera non seulement condamné à rembourser le prix de vente, mais également l’ensemble des frais exposés pour l’entretien du cheval y compris la pension s’il est hébergé dans un centre équestre ou une écurie de propriétaire.
En pratique, en raison de la durée de la procédure, le montant des dommages et intérêts peuvent rapidement représenter une somme équivalente au prix d’achat de l’équidé.
Si la vente a eu lieu entre deux particuliers ou deux professionnels, la sanction consistera en le simple remboursement du prix et la reprise du cheval, sauf à démontrer que le vendeur avait connaissance du vice et l’avait sciemment caché.
Parce l’acheteur peut s’être attaché à son nouveau compagnon, il a aussi la possibilité d’engager une action estimatoire qui lui permet de conserver l’équidé, et d’obtenir une diminution du prix, avec parfois des dommages et intérêts complémentaires notamment si le cheval nécessite des soins au long cours.
En résumé en l’absence de contrat écrit, les juges prendront en compte l’ensemble des éléments précontractuels, et notamment tous les échanges entre vendeurs et acheteurs.
II paraît donc essentiel de prévoir un contrat, qui contrairement à ce qui est communément admis par les professionnels du secteur, sera bien plus protecteur pour eux et évitera tout risque contentieux.
Le vendeur peut également s’engager à garantir l’acheteur contre les vices cachés, mais le contrat écrit prendra soin d’informer l’acquéreur notamment si c’est un particulier sur les aptitudes du cheval, et surtout pourra mettre en évidence que l’acquéreur n’a pas souhaité faire appel à un vétérinaire, ou encore à professionnel pour son achat.
Au-delà, le contrat peut prévoir tout autre type de garantie et notamment la reprise du cheval dans certaines conditions pendant une période déterminée par les parties avec ou sans baisse de prix ; la liberté contractuelle est de mise dans ce cadre, dès lors que les vices rédhibitoires tels que prévus par le Code Rural sont garantis.
3. Le dol
Le dol est défini par l’article 1137 du Code Civil :« Le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manœuvres ou des mensonges.
Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.
Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation. »
Le dernier cas prévu par le code rural est celui du dol qui permet d’obtenir l’annulation de la vente lorsque le vendeur a sciemment dissimulé ou omis de donner une information importante à l’acheteur et qui aurait été déterminante de son consentement.
Il appartient cependant à l’acheteur de rapporter la preuve que le vendeur en avait connaissance et que cette information était déterminante de son achat.
Par exemple le fait de cacher à l’acheteur que le cheval a été opéré de colique ou qu’il a subi une opération liée par exemple à une pathologie d’ostéochondrose, pourrait entraîner l’annulation de la vente.
Enfin, comme toute convention, la vente des équidés reste soumise au droit commun en ce qui concerne notamment les vices du consentement (erreur sur les qualités substantielles, violence) et le vendeur est soumis à une obligation d’information renforcée lorsqu’il est professionnel et que l’acquéreur est un consommateur même très averti.
Très récemment, le Tribunal Judiciaire de Bordeaux a reproché au vendeur de ne pas avoir informé l’acquéreur que du fait de sa génétique, la jument ne pouvait qu’avoir un très fort caractère qu’un travail régulier et quotidien était nécessaire.
4. Les accessoires de la vente
Au moment de la vente, le vendeur doit remettre à l’acquéreur le livret signalétique du cheval ainsi que son certificat d’immatriculation, communément appelé carte de propriétaire.Si le livret signalétique doit être impérativement remis puisqu’il doit suivre le cheval dans tous ses déplacements, la remise du certificat d’immatriculation peut être différée au paiement complet du cheval.
Enfin depuis 31 décembre 2022, en application de la loi du 30 novembre 2021 sur le bien-être animal, tout vendeur d’équidé doit exiger de l’acquéreur qu’il lui présente le « Certificat d’Engagement et de Connaissance » de celui qui sera le détenteur du cheval.
Le détenteur du cheval est celui qui hébergera le cheval. S’il s’agit d’un professionnel, il s’agira d’une simple attestation dans laquelle, il précisera soit qu’il est détenteur d’un des diplômes lui permettant d’enseigner par exemple soit qu’il a une expérience supérieure à 18 mois en contact direct avec les équidés.
En revanche le détenteur personne physique devra obtenir ce certificat auprès des organismes autorisés à le délivrer, très souvent après une formation.
Pour l’essentiel ces organismes sont ceux qui fédèrent les utilisateurs tels que la FFE, la SHF, le Groupement Hippique National, la SFET, France Galop…. Les vétérinaires sont également habilités à délivrer ledit certificat.
Toute personne qui vendrait ainsi un équidé sans s’assurer que le nouveau détenteur est titulaire du Certificat d’Engagement et de Connaissances s’expose en cas de contrôle à une amende de 3ème classe.
En résumé, afin de sécuriser la vente d’un équidé, il est recommandé d’établir un contrat écrit qui déterminera avec précision les garanties qui sont dues par le vendeur soit en augmentant le périmètre des obligations découlant des seuls vices rédhibitoires, soit en les limitant à eux-seuls.
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Marie MANDEVILLE et Nicolas MASSON
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